L'association publie sept propositions pour refondre le marché de la musique. Avec l'espoir de convaincre le patron de la Fnac qui doit bientôt proposer des solutions contre le piratage.

Arnaud Devillard , 01net., le 14/11/2007 à 17h25

La mise en place de la mission Olivennes, chargée début septembre de réfléchir à la lutte contre la piratage d'oeuvres numériques a bel et bien relancé la bataille d'arguments sur le sujet. Après le Syndicat national de l'édition phonographique et la Société des auteurs et compositeurs dramatiques, c'est au tour de l'UFC-Que Choisir, auditionnée par Denis Olivennes (également président de la Fnac) le 17 octobre dernier, de donner son avis. L'association de défense des consommateurs publie sept propositions, certaines rappelant d'anciennes prises de position, d'autres sont plus nouvelles.

La riposte graduée : une impasse juridique

L'UFC-Que Choisir n'a jamais été fan de la riposte graduée, ce mécanisme soutenu par l'industrie du disque et consistant à envoyer des messages d'avertissement aux internautes qui téléchargent illégalement avant de les sanctionner par des contraventions s'ils persistent. « Les internautes qui téléchargent sont peu affectés par la perspective d'un risque juridique », estime Alain Bazot, le président de l'association. La mise en oeuvre du dispositif poserait aussi des problèmes juridiques. Il oblige les FAI à participer puisqu'ils sont chargés d'envoyer les messages.

Or, dans l'histoire, ils ne subissent aucun dommage. Dans ces conditions, en droit, ils ne devraient pas être tenus de respecter une démarche pénale. Ensuite, par nature, la riposte graduée ne permet pas de vérifier si c'est bien l'abonné derrière son ordinateur qui télécharge. Enfin, argument classique : le respect de la vie privée. Le mécanisme implique, à un moment où à un autre, la collecte d'adresses IP. Une démarche qui poserait problème au regard de la loi informatique et libertés.

Le filtrage : pas au point

Autre argument récurrent, le filtrage n'est pas techniquement au point et, de toute façon, le principe porte atteinte aux libertés publiques. « Nous n'avons pas une expertise particulière sur le sujet, prévient Julien Dourgnon. Mais nous avons collecté différents avis techniques, notamment auprès de l'AFA. » L'Association française des FAI, rappelons-le, a toujours été résolument hostile au filtrage des contenus sur les réseaux... Dans une interview récente à Libération, Denis Olivennes s'était lui-même dit réservé sur le filtrage, au moins sur le plan de l'efficacité technique.

Les prix : une autorité pour les réguler

Selon l'UFC-Que Choisir, l'internaute est prêt à payer la musique en ligne, mais pas au prix actuel. « Le problème, continue Julien Dourgnon, c'est que l'on a un prix imposé par l'industrie, supérieur au consentement à payer. C'est contraire au mécanisme de l'offre et de la demande ». L'association imagine une autorité de régulation du marché, comme pour le secteur des télécommunications avec l'Arcep.

Et puisque la loi droit d'auteur et droits voisins a créé une Autorité de régulation des mesures techniques de protection (DRM), pourquoi ne pas attribuer les deux compétences à un même organisme ? Le livre blanc sur le peer to peer présenté récemment par le Snep envisageait, lui, une autorité censée veiller à la bonne application du filtrage et à la collaboration des FAI en matière de répression du piratage. Bref, c'est clair, ce marché a besoin d'un peu d'autorité...

Les prix (bis) : un nouvel étiquetage

Toujours concernant les prix, histoire d'informer l'internaute où vont ses sous, l'UFC-Que Choisir préconise d'indiquer la part qui revient au créateur, celle qui va au distributeur et celle destinée au producteur. Les DRM : toujours non. Pas de nouveauté du côté des mesures de contrôle de la copie des fichiers, l'association est contre.

Madonna en exclusivité sur Orange : à interdire

Apparemment choquée par l'opération d'Orange qui proposait, avant les distributeurs de musique, un single de Madonna, l'UFC demande l'interdiction de cette pratique. Parce qu'elle lie l'achat d'une oeuvre à la souscription d'un abonnement de téléphonie. Et parce qu'inévitablement ceux qui sont privés de la chanson vont aller la chercher illégalement.

Les catalogues : une exploitation aberrante

Généralement, les plates-formes légales de distribution de musique négocient label par label (ou société de gestion de droits par société de gestion de droits) l'exploitation des oeuvres. « Quand vous allez à la Fnac, explique Julien Dourgnon, vous n'avez pas un tri par catalogue mais par artiste. Sur Internet, le marché est structuré non pas par oeuvre mais par maison de disques. » D'où encore des « trous » dans l'offre.

L'UFC-Que Choisir avance une autre idée. Internet permet de s'affranchir de la gestion de stocks et de la place en rayon. Donc d'exploiter à peu près tout, même les oeuvres rares et les moins demandées. Du coup, si le détenteur d'un catalogue ne l'exploite pas pendant un certain temps, il faudrait pouvoir lui en retirer l'exclusivité et autoriser quelqu'un d'autre à le commercialiser.

Tag(s) : #économie
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